La publication de la Feuille de route dédiée à l’économie circulaire (FREC) a récemment été publiée par le Gouvernement. La phase d’élaboration de ce projet exceptionnel a fait appel à l’avis de tous les citoyens. Retours sur leurs attentes en matière de recyclage des déchets.
C’était une promesse annoncée par Brune Poirson, secrétaire d’Etat auprès du Ministre d’Etat de la transition écologique et solidaire, le 28 septembre 2017 : établir une Feuille de route dédiée à l’économie circulaire avec des mesures concrètes pour atteindre les objectifs du Plan climat en application de la loi LTECV (Loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte).
Voici les objectifs dans les grandes lignes de la FREC publiée le 23 avril dernier : réduire les déchets de 50 % pour 2025, diminuer la production de gaz à effet de serre ou encore favoriser la création de 500 000 nouveaux emplois et métiers autour du recyclage, de la revalorisation et du tri. On retrouve également une très forte ambition de favoriser le recyclage des plastiques : le but étant de les recycler à 100 % pour 2025. Des enjeux primordiaux depuis que la Chine a fermé ses portes au recyclage aux autres pays européens.
Une élaboration « démocratique »
Fait innovant dans l’élaboration de cette Feuille de route, tout citoyen était non seulement invité à s’exprimer sur une plateforme en ligne sur 5 grandes thématiques (consommation durable, gestion des déchets, production durable, mobilisation des acteurs et cadre financier pour favoriser la transition vers l’économie circulaire) mais également à participer à des ateliers.
Une initiative qui a parfaitement bien fonctionné, selon les chiffres enregistrés sur la toile : 1 784 contributions, 1 197 commentaires, soit 2 988 avis qui ont ensuite donné lieu à 16 071 votes au total. Il en est de même pour les ateliers organisés avec les parties prenantes.
Selon Claire Tournefier-Droual, directrice de l’association Rejoué et qui a été désignée ambassadrice de l’économie circulaire par le Gouvernement pour animer l’élaboration de la FREC et promouvoir sa mise en œuvre auprès du public : « J’ai ressenti une véritable volonté des parties prenantes de s’engager. Il y avait environ entre 70 et 100 participants à chacun des ateliers, ce qui était un très bon signe de l’intérêt pour ce sujet ! ». Autre constat de « l’ambassadrice » sur cette démarche, cette dernière a été « l’occasion de réunir et faire échanger des parties prenantes qui n’ont pas l’habitude de dialoguer ensemble. Cela a permis de tisser les liens entre des acteurs très diversifiés tels que les ONG, structures patronales, associations, collectivités, etc. »
Foisonnement d’idées pour repenser le tri des déchets
La participation s’est clôturée le 25 février dernier et a donné lieu à une synthèse de la part du Ministère de la Transition Écologique et Solidaire. Résultats ? La thématique qui a le plus mobilisé les internautes est celle du « mieux consommer », avec en particulier les questions autour des informations dont les consommateurs ont besoin pour acheter plus durable, leurs conditions pour choisir un produit réutilisable plutôt qu’un produit à usage unique et sur ce qui les inciterait à faire réparer les objets détériorés plutôt que de les jeter.
En matière de tri et de recyclage, la question qui a le plus fortement animé les réseaux est celle de l’amélioration du tri des déchets (44 %). Pour la plupart des contributeurs, il s’agit en réalité de revoir en amont les modes de consommation en évitant de produire et d’acheter des emballages qui seront de futurs déchets. D’où de nombreuses propositions autour de l’achat d’occasion, la location, la réduction du volume des emballages (suppression des gobelets à usage unique, réutilisation des supports en plastique…) et de la fabrication d’emballages alternatifs. Certains proposent même de créer des lieux de proximité permettant de déposer les objets dont on ne veut plus… voire de retirer les poubelles publiques et l’incinération pour inciter au tri !
« Sensibiliser le public sans le faire culpabiliser »
L’accent est également mis sur la sensibilisation auprès du grand public « sans faire culpabiliser ». Un contributeur va jusqu’à proposer la création d’un service à la demande de collecte pédagogique autour des déchets spécifiques. Un autre suggère de faire du tri un jeu à l’instar des jeux vidéo Game of tri ou Compost Challenge quand d’autres appellent à ce que le tri soit une source de revenus.
Autre forte sollicitation des citoyens : l’amélioration du tri des déchets, notamment par un accès facilité aux bacs, lieux de collecte ou de tri. Ainsi, l’augmentation du nombre de poubelles de recyclage est une demande récurrente, surtout dans les zones rurales. Ainsi que l’uniformisation et clarification pour les couleurs de bac et poubelles sur le territoire français.
Enfin les citoyens sont favorables à utiliser la taxation (principe de bonus/malus ou encore pollueur/payeur, taxe sur les emballages plastiques voire tous les déchets non recyclables, etc.) comme levier d’incitation ainsi que l’imposition de normes et de systèmes de contrôle (rendre le tri et le don de matériel électronique usagé obligatoire ou encore contrôler le tri effectué par les citoyens, ou encore appliquer des amendes pour le jet de déchets dans la rue et décharges sauvages).
« Il faut rendre à la planète ce qu’on a prélevé »
Ces contributions ont donc balayé un large spectre du recyclage. Pour Claire Tournefier-Droual, le Feuille de route économie circulaire a un grand rôle à jouer dans la gestion des déchets : « elle va contribuer à faire évoluer les mentalités autour des déchets. Pour les réduire, la première étape consiste à penser directement à ce qu’ils pourraient représenter comme ressources pour la planète. Pour le moment, on essaye de « réparer » au lieu de « nourrir ». Pourtant, il faut rendre à la planète ce qu’on a prélevé, ce qui signifie changer la manière dont nous pensons depuis des décennies ».